VR “Un soir avec les impressionnistes. Paris 1874” : The Time Machine
Les images de l’expérience VR sont extraites du trailer.
Une production Excurio / Gédéon Expériences / Musée d’Orsay.
Comme les shows immersifs du type “L’Atelier des Lumières” ne sont vraiment pas pour moi et que je mettais tout dans le même panier sans savoir, j’ai sous-estimé la VR (Virtual Reality) jusqu’à maintenant. Au Musée d’Orsay, l’expérience - le parcours, la visite, la promenade, le voyage… je ne sais pas vraiment comment qualifier ça - proposée à l’occasion de l’exposition “Paris 1874. Inventer l’impressionnisme” m’a convaincu. Dès les premières secondes, la plus-value de la réalité virtuelle pour la pédagogie et l’entertainment m’ont sauté aux yeux. Mea culpa d’un sceptique.
Parce qu’en se retrouvant sur la place de l’Opéra en 1874 et en hésitant à lever le pied pour monter sur un trottoir en 3D afin de ne pas se heurter aux piétons et aux carrioles, on se dit que quelque chose se passe. Et qu’il va bien falloir s’y habituer.
Il va falloir s’habituer à découvrir pour la première fois des lieux qu’on croyait connaitre pour les avoir étudiés dans des livres, dans des expositions, online. La première exposition impressionniste chez Nadar en 1874 par exemple, puisque c’est celle qu’on découvre à Orsay. Enfin, une projection de l’exposition puisqu’il n’y a pas de photos ou de plan qui préserve la réalité de ce qu’elle a été. Ce qu’on en parcourt et ce qu’on en voit n’est qu’une restitution possible, probable, due au travail d’historiens, d’auteurs, de graphistes, d’informaticiens et de techniciens qui ont crée un programme. Sur le coup, on n’est pas dupe, on sait malgré l’étrange expérience qu’on fait qu’il ne s’agit que d’une modélisation. Aussi réussis soient-ils, les décors et les personnages restent des animations que le cerveau réussit encore à reconnaître comme tels. Mais bientôt ?
2024 ou 1874 ? Ici ou là-bas ? Où sont-elles, où sont-ils exactement ?
Quand on vit quelque chose, une expérience ou un événement, on en capte en le vivant l’ensemble et les détails, le sens et la sensation, le moment et le lieu. Sans doute pas dans le cadre d’un trauma, mais ce n’est pas le cas ici. Puis, avec le temps, la mémoire ne garde de ce qu’on a vécu que des éléments ponctuels : un détail précis, une atmosphère, une impression…
J’ai toujours regretté de n’avoir jamais pu voir “pour de vrai” ce que pouvait être un Salon d’art contemporain “officiel” à la fin du XIXe siècle : la sélection d’oeuvres, l’accrochage, le public et ses commentaires, l’ambiance générale, le kitsch aussi. Tout ça qui n’existe plus. Dans l’expérience VR d’Orsay, on va au Salon de 1874 et on peut se balader dans les salles, regarder les oeuvres, observer les visiteurs... Sur le moment, j’avais conscience de l’artifice technologique. Quelques jours plus tard, je me souvenais de mon enthousiasme de l’expérience physique et visuelle. Dans quelque temps, peut-être - je ne sais pas, on verra bien - je me rappellerai surtout d’avoir vu un Salon des années 1870 et l’impression que j’ai gardée du décor, de l’ambiance, des tableaux sur les murs. J’aurai le souvenir d’un voyage que je n’ai pas fait.
Je serai aussi entré dans une peinture que je connaissais bien et dont je n’avais jamais imaginé qu’elle ait pu être plus qu’une peinture, un espace à pénétrer. Que l’escalier sur la gauche menait à une mezzanine juste au-dessus de ma tête. Et que je pouvais écouter les conversations des artistes autour d’un verre. Un jour, avec l’IA, je devrais même pouvoir y participer. Je pensais à tout ça avec mon casque sur la tête, dans le volume de l’espace VR du musée d’Orsay et en même temps, dans l’atelier de Bazille, rue de la Condamine.
Par la réalité virtuelle du musée d’Orsay, j’étais en même au plein-air de la Grenouillère à Crossy aux côtés de Monet et de Renoir et dans l’espace claustrophobique mais invisibilisé de l’expérience, au milieu d’inconnus comme moi dont seules les silhouettes annonçaient régulièrement la proximité. En retirant mon casque au bout des 45 minutes du voyage, je me suis rendu compte que finalement, je serais bien resté un peu plus longtemps sur le balcon au Havre avec Monet, dans le matin orangé d’Impression, Soleil levant. Et je me suis à imaginer aux applications - vertigineuses et prochaines - de tout cela…
Image capturée au retour de l’expérience VR “Un soir avec les impressionnistes” au musée d’Orsay. Un peu désorienté et confus mais la tête déjà pleine de souvenirs de ce que j’ai vu et appris de mon voyage en 1874. Les autres, derrière, y sont toujours. La machine à explorer le temps n’est plus tout-à-fait un fantasme.
Expérience VR “Un soir avec les impressionnistes. Paris 1874” du 26 mars au 11 août 2024
Exposition “Paris 1874. Inventer l’impressionnisme” du 26 mars au 14 juillet 2024
Le texte ci-dessus ne reflète que mon avis personnel